Le Traitement des Bouddhistes

Posted 02 décembre 2015 / Mis à jour 16 janvier 2017
Democratic Kampuchea Zone
Democratic Kampuchea District
Democratic Kampuchea Sector
Current Day District
Current Day Province
Alleged Crimes

[Avertissement: Le contenu des ordres de fermeture sont des allégations qui doivent être prouvées par des débats contradictoires. En tant que tel, les allégations ci-dessous ne peuvent pas être traitées comme des faits, sauf si elles ont été établies par un jugement définitif.]

Extrait de l'Ordre de Fermeture du Dossier 002: (Les charges 

From the Case 002 Closing Order:(Les charges liées au traitement des Bouddhistes dans l'Affaire 002/02 sont limitése aux crimes prétendument commis dans les coopératives de Tram Kok).

D. MESURES DIRIGÉES CONTRE DES GROUPES SPÉCIFIQUES

205. L’une des cinq politiques mises en œuvre pour réaliser et défendre la révolution socialiste par tous les moyens nécessaires consistait à prendre des mesures contre des groupes spécifiques. Cette action a affecté directement ou indirectement de nombreux groupes présents au Cambodge à l’époque des faits. Les co-juges d’instruction ont été spécifiquement saisis d’actes visant les groupes cham, vietnamien et bouddhiste ainsi que les anciens responsables (notamment les fonctionnaires, les militaires et leurs familles) de la République khmère, ces actes ayant été commis par le PCK en divers endroits du Cambodge dès avant 1975, aux premiers stades de sa prise de contrôle de certaines portions du territoire, et jusqu’au 6 janvier 1979 au moins.

206. Les co-juges d’instruction ont été saisis de mesures dirigées contre les Chams dans les Zones Centrale, Est et Nord-Ouest, contre les Vietnamiens dans les provinces de Prey Veng, de Svay Rieng (Zone Est) et lors d’incursions au Vietnam, contre les bouddhistes dans tout le Kampuchéa démocratique, et contre les anciens responsables de la République khmère lors du déplacement de la population de Phnom Penh. Ce dernier évènement constitue l’un des nombreux exemples d’un ensemble de mesures visant les anciens fonctionnaires de la République khmère.

207. Un des objectifs de cette politique était l’instauration, par l’abolition de toutes les différences ethniques, nationales, religieuses, sociales et culturelles, d’une société athée et homogène sans divisions de classe. Cet objectif est attesté par des documents du Parti relatifs à la question des classes. En 1974, un article de Pol Pot publié dans l’Étendard révolutionnaire faisait valoir qu’il existait au Cambodge une « classe spéciale » constituée « [d]es soldats, des agents de police et des bonzes ». Selon les notes prises par des cadres et se référant apparemment audit article, toutes les minorités nationales étaient elles aussi considérées comme faisant partie d’un « type de classe spécial et séparé ». D’autres classes, tels les féodaux, les capitalistes et les bourgeois, étaient décrits comme des opposants à la révolution. En septembre 1975, la mise en œuvre de cet objectif a connu une évolution quand le PCK a proclamé l’abolition de ces classes et de la classe spéciale séparée, déclarant que seules existaient les classes des travailleurs et des paysans, toutes les autres s’étant fondues dans ces deux groupes. À ce moment ou peu après, la radio de Phnom Penh a fait pour la dernière fois mention des moines bouddhistes, des Chams et d’autres « minorités nationales ». Bien que les hautes autorités du Parti eussent continué à parler, jusqu’en 1976, d’une population cambodgienne comprenant des nationalités non khmères, il a été officiellement annoncé en août 1977 que l’abolition et l’assimilation de fait des minorités nationales était telle que l’on pouvait parler d’un pays à « 99 pour cent » khmer. Un autre objectif de cette politique était d’éliminer les ennemis et de détruire en tout ou en partie certains groupes comme tels. Les mesures dirigées contre des groupes spécifiques occupaient une place importante dans « tous les efforts possibles » entrepris par le PCK pour que la situation fût « bénéfique à la révolution »


Dates et Participation
[…]
210. Les mesures dirigées contre les bouddhistes résultaient d’une politique qui existait le 17 avril 1975 ou avant cette date et qui a continué d’exister jusqu’au 6 janvier 1979 au moins. Les plus hautes personnalités de la hiérarchie bouddhiste furent executées au cours de l’évacuation de Phnom Penh, selon ce qui aurait été rapporté à Duch par ceux qui ont perpétré les exécutions. L’article 20 du chapitre 15 de la Constitution du Kampuchéa démocratique était censé régir la question religieuse en ces termes : « Chaque citoyen du Kampuchéa a le droit d’avoir des croyances et des religions, et a tout aussi bien le droit de n’avoir ni croyance ni religion. Est rigoureusement interdite toute religion réactionnaire portant atteinte au Kampuchéa démocratique et à son peuple ». Il est cependant apparu que la liberté du culte qui aurait dû être consacrée par ces dispositions était une supercherie, dès lors que toutes les religions étaient considérées comme réactionnaires. Toute religion était donc interdite par le Parti, y compris le bouddhisme. De fait, les pagodes ont été détruites et pratiquement tous les moines et toutes les nonnes bouddhistes ont été défroqués, certains moines réfractaires étant menacés de mort ou tués. Le peuple était appelé à accorder son allégeance et sa foi à l’ « Angkar » et non à la religion. L’abolition du bouddhisme et de la vie monastique bouddhiste a été justifiée au niveau local par la présomption que les moines faisaient partie de la « classe spéciale », laquelle était présentée par les cadres locaux comme une classe d’exploiteurs et d’oppresseurs. Cette politique a été mise en oeuvre dans tout le Cambodge pendant la durée du régime du Kampuchea démocratique.

[...]

D. TRAITEMENT DES GROUPES SPÉCIFIQUES

Traitement des Bouddhistes

740. Le PCK adopta une politique d’interdiction du bouddhisme et de sa pratique. De nombreuses pagodes et lieux de culte furent détruites ou converties à d’autres usages : centres de sécurité, porcheries, réfectoires, hôpitaux ou entrepôts. Les représentations de Bouddha furent détruites. Il fut même interdit d’allumer des bâtons d’encens. Le Parti incitait à la haine à l’encontre des moines et des nonnes, la propagande assimilant les moines à des parasites, aux sangsues, aux ténias. Un témoin raconte « On n’autorisait pas de faire des cérémonies, tous les bonzes étaient défroqués. Les chefs des unités, de village, de la commune avaient déclaré l’interdiction [de] la foi dans les êtres invisibles. On disait (…) que les gens portant des costumes, les féodaux suçaient le sang du peuple ».

741. On défroqua quasiment tous les moines et nonnes bouddhistes. Certains moines qui refusaient d’obéir furent menacés de mort ou exécutés. Une fois défroqués, les moines étaient employés de force aux travaux manuels et agricoles. Un ancien bonze déclare qu’il fut marié de force et que, s’il avait refusé, il aurait été conduit à « la tombe ». 

742. Les témoignages divergent sur l’origine des ordres de persécution des moines bouddhistes. Certains témoins parlent d’ordres venant de l’« échelon supérieur »3181 ou du « centre du parti ». D’autres décrivent des réunions du comité de district dans leur région3183 ou font état d’ordres reçus directement des secrétaires de district et de sous-district.

743. L’abolition de la religion, la destruction des pagodes, leur utilisation pour d’autres fonctions se sont produites dans toutes les provinces cambodgiennes sous le régime du Kampuchéa démocratique : on en trouve des exemples dans la Zone Sud-Ouest (notamment à la pagode Wat Damnak Trayoeng dans le District de Touk Meas, province de Kampot), dans la Zone Nord-Ouest (notamment aux pagodes Wat Samrong dans le District de Ek Phnom, province de Battambang et Wat Kirirum dans le District de Phnom Sampov, province de Battambang), dans la Zone Centrale (ancienne Zone Nord), dans la (nouvelle) Zone Nord, dans la Zone Est (notamment aux pagodes Wat Chambak, dans le District de Chantrea, province de Svay Rieng et Wat Ta Kut et Wat Me dans le District de Ksach Kandal, province de Kandal et Wat Thlork dans le District de Svay Chrum, province de Svay Rieng), dans la Zone Ouest, dans la Zone Nord-Est (notamment à la pagode Wat Chey Mongkul dans le District de Se San, province de Stung Treng) et dans le Secteur Autonome de Kratie (secteur 505, notamment à la pagode Wat Antung Vien dans le District de Kratie, province de Kratie).